Européennes : une V° République anachronique
La France va élire ses représentants au Parlement européen au moment même où elle s’affiche aux yeux du monde comme une Etat incapable de mener sa décolonisation jusqu’au bout. La Nouvelle-Calédonie est devenue l’emblème de l’échec d’un processus ouvert il y a plus de trente ans, qui laissait espérer une modernisation constitutionnelle de la vieille République française. Le bond en arrière est stupéfiant : nous en sommes à un moment où le président en exercice menace de recourir à un référendum métropolitain pour trancher le sort du peuple Kanak.
Cette situation est due au fait que le présidentialisme en vigueur dans la V° République autorise à une personne souveraine de décider comme bon lui semble, de solutions erratiques. Les mandats d’Emmanuel Macron en surabondent et dans tous les domaines, intérieurs comme extérieurs (Ukraine, Israël, Union Européenne). Le discrédit et l’affaiblissement du pays atteignent un tel niveau qu’il faut lui refuser le moindre soutien.
C’est aussi refuser de cautionner le lamentable spectacle qui voit l’Exécutif offrir à l’extrême-droite le rôle d’interlocuteur respectable et exclusif. Celle-ci a pris la tête du cortège xénophobe et raciste sous la bannière de « la préférence nationale ». Elle coalise ainsi jusqu’à la droite dite républicaine, pour mener un combat contre les droits fondamentaux et les contre-pouvoirs qui les défendent, dont les juridictions nationales et européennes. On n’aurait garde d’oublier que Marine Le Pen est la plus ardente avocate de la Constitution de 1958. On doit supposer que son ectoplasme du sérail, Jordan Bardella, l’est aussi. Pas une voix ne doit les encourager.
Force est donc de constater que depuis les dernières élections européennes, la France a perdu toujours plus de moyens pour agir en Europe et y promouvoir la démocratie. Elle le doit à un régime qui est intrinsèquement anachronique, autoritaire et exotique dans le concert européen.
En sortir, c’est, comme y appelle l’écrivain martiniquais (prix Goncourt) Patrick Chamoiseau, promouvoir « une VI° République, la rendre capable d’accueillir en pleine autorité tous le peuples-nations qui le voudraient ; d’inaugurer ainsi le pacte républicain ouvert qu’exige la nouvelle réalité (post-coloniale, post-capitaliste, post-occidentale) qu’annonce notre mondialité. »
La compétence de la C6R n’est pas universelle. Elle n’intervient dans le débat européen que si les institutions de l’UE ont à voir avec la démocratie dans le pays, comme elle n’avait pas hésité à le faire en s’opposant au Traité constitutionnel en 2005.
Dans le contexte où nous nous trouvons, elle estime opportun de faire, des considérations exposées ici, le critère d’un vote le 9 juin pour les listes qui s’inscrivent dans la perspective de l’avènement d’une nouvelle République.
Le Conseil d’administration de la C6R
29 mai 2024