Communiqué de la C6R
La Convention pour la 6° République (C6R) a suivi avec une particulière attention l’installation de la « Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique » définie par le décret du 16 juillet 2012 :
Elle concerne en effet directement les annonces faites par François Hollande durant sa campagne. La C6R leur avait accordé un grand intérêt et les avait soutenues tant elles semblaient rompre avec une passivité récurrente de la Gauche au pouvoir vis-à-vis d’un régime présidentialiste anachronique. La méthode elle-même semblait nouvelle puisque le futur président de la République sollicitait par avance l’action de sa majorité parlementaire pour mettre en œuvre et étendre ces réformes. Le temps de ces espoirs est-il révolu ? La « commission Jospin » est à la fois décevante et inquiétante.
Décevante, elle l’est dans la mesure où elle confisque la responsabilité des parlementaires au profit d’une improbable commission de techniciens et d’experts. Les élus de la Nation auront au mieux le choix d’amender des projets de loi rédigés en la forme par six haut-fonctionnaires rapporteurs. On cherche en vain la présence de « personnalités représentatives de sensibilités diverses » (selon les termes du président de la République dans sa lettre du 16 juillet), sensibilités dont le Parlement est normalement le siège légitime. De ce point de vue, les commissions Vedel (installée par Mitterrand en 1992) et Balladur (installée par Sarkozy en 2007) étaient autrement plus ouvertes ; à tous les sens du terme : elles ont procédé à des auditions d’ONG et de praticiens et elles ont tenu la presse informée de leurs travaux, ce qui ne sera pas le cas en l’occurrence. Si l’on ajoute à leurs rapports (dont beaucoup de mesures sont restées lettre morte), celui de la commission Sauvé (« pour la prévention des conflits d’intérêt dans la vie publique ») rendu le 26 janvier 2011, on dispose d’un ensemble très complet de dispositions susceptibles de corriger de nombreux défauts de la V° République. Au lieu de s’en saisir, la commission Jospin semble renouer avec la fatale conception d’une Gauche qui considère que la réforme constitutionnelle est une affaire juridique plus que politique ; qu’elle n’est en tout cas pas un enjeu démocratique.
Et c’est en ce sens qu’elle est inquiétante. La déclinaison de ses missions est une restriction du champ des réformes voulues par François Hollande : les nouveaux droits parlementaires pour enquêter sur l’action du gouvernement et les « dysfonctionnements » de l’administration, le renforcement de la garantie de l’indépendance de la justice (réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature) et des médias, le droit de vote des non-nationaux aux élections locales, l’extension du contrôle parlementaire des nominations du ressort du Président, l’inscription dans la Loi fondamentale de dispositions sur la laïcité, de la notion de « démocratie sociale », l’abrogation du terme de « race », la ratification de la Charte européenne sur les Langues régionales ; tout ceci a disparu. Le statut pénal du chef de l’Etat et la suppression de la Cour de justice de la République seront un « sujet d’interrogation ». La commission formulera « des propositions permettant d’assurer le non-cumul des mandats » alors même que toutes les forces politiques de gauche et les socialistes en particulier ont adopté des mesures très précises et détaillées en la matière. Par contre un soin particulier sera accordé à un « meilleur déroulement de l’élection présidentielle » depuis les parrainages jusqu’à l’harmonisation de son calendrier avec celui des législatives.
Des questions essentielles concernant le Conseil Constitutionnel ou le référendum d’initiative populaire ne sont même pas posées.
Faut-il faire son deuil de l’espoir soulevé par une campagne qui avait remis un grand nombre de sujets institutionnels dans le débat public ? Faut-il attendre le 15 novembre prochain, date de remise du rapport de la commission pour démocratiser la discussion de son contenu ? La C6R déplore la méthode et la restriction des ambitions d’une réforme de la République qui, sans coûter un Euro au contribuable, est la voie d’un retour de la confiance du citoyen dans la vie politique.
Le 30 juillet 2012
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