22 avril 2015 | Par Paul Alliès - Mediapart.fr
Vient de se tenir à l’Assemblée Nationale, ce 16 avril, une rencontre-débat dont l’originalité était de faire se rencontrer toutes les formations de Gauche sans exception. Son intérêt : démontrer que la revendication d’une 6° République peut être un élément d’un programme commun à toutes ces formations.
L’initiative avait été prise par les animateurs de la contribution "L’optimisme de la Volonté" déposée par les amis de Benoit Hamon et Arnaud Montebourg pour le congrès du Parti socialiste (depuis, cette contribution se retrouve dans la Motion B " A Gauche, pour gagner" conduite par Christian Paul). L’animateur, le magistrat Vincent Sizaire, a réussi à réunir autour de lui : Eric Alt (Nouvelle Donne), André Bellon (Président de l’Association "Pour une Constituante"), Nicole Borvo Cohen-Seat (Parti Communiste), Bastien François (Europe Ecologie-Les Verts), Raquel Garrido (Parti de Gauche - Mouvement pour la 6° République), Paul Alliès (Président de la "Convention pour la 6° République") ainsi que Pourria Amirshahi, député socialiste et Guillaume Balas, député européen socialiste qui a conclu la rencontre.
Ce rassemblement est en soi, un premier évènement dans le contexte de divisions, concurrences et exclusions qui mine la Gauche en ce moment. Sans doute toutes les formations représentées ont eu l’occasion par le passé d’exprimer leur engagement en faveur d’une 6° République ; mais il n’était pas sans intérêt de vérifier que celui-ci peut être le socle d’une convergence, si ce n’est d’une unité programmatique. Et c’est bien ce qui a été fait lors de ce débat.
D’abord on a pu constater que les divers degrés de mobilisation en faveur d’un nouveau Régime n’ont pas introduit de nouveaux ressentiments. En clair, personne n’a reproché au Front de Gauche ou à Jean-Luc Mélenchon de faire de la 6° République le sujet prioritaire de son investissement depuis l’été dernier, au risque de sembler se l’approprier. Au contraire, l’accord est général sur le fait que toutes les actions en ce sens sont bonnes à prendre dans la mesure où elles en popularisent l’idée. Et d’aucuns considèrent que la perspective doit être approfondie pour la rendre crédible et désirable à une majorité garnissante de Français (62% se déclarent d’ores et déjà favorables selon un sondage Odoxa pour Le Parisien, le 23 novembre dernier).
Ensuite, si un vrai débat existe sur les modes de passage à une nouvelle République, les divergences apparaissent comme surmontables. Les partisans de la réunion d’une Assemblée Constituante comme préalable à tout changement (essentiellement A. Bellon et R. Garrido) conviennent d’une autre voie qui pourrait être celle permise par l’article 11 de l’actuelle Constitution : à la suite d’élections présidentielle et législative et dés lors que le ou la président(e) et les députés élus auraient fait du changement de Constitution un sujet de leur programme durant la campagne, ils auraient reçu un mandat constituant autorisant dès après leur élection, soit la tenue d’un référendum soit un engagement de responsabilité du Premier ministre. Ce premier acte ouvrirait le processus d’un vaste débat dans le pays (comme en 2005 sur le TCE) tant à l’Assemblée Nationale (qui deviendrait constituante quelques jours par semaine durant quelques mois) que dans l’opinion (avec l’ouverture d’un Forum consultatif réunissant, sous l’autorité du ou de la Garde des Sceaux des experts et des citoyens tirés au sort ; ce comité piloterait sur Internet un débat interactif sur les principales matières de la Loi fondamentale. Ce processus serait clôt par un dernier référendum de ratification.
Enfin, s’il reste des questions en suspens, elles sont de nature à féconder et à politiser le débat. Par exemple sur la place du Tirage au sort pour sélectionner les constituants ; sur la composition de l’Assemblée (avec ou sans des élus présents ou passés d’instances de la V° République) ; sur l’étendue d’une nouvelle génération de droits fondamentaux dans le Préambule. Mais ces questions (nourries d’expériences étrangères : celles de l’Islande, de la Tunisie, du Portugal ont été sollicitées) n’obèrent pas un accord fondamental sur la nature du nouveau Régime qui serra de type parlementaire et primo-ministériel. Ce n’est sans doute pas là une condition suffisante pour réaliser toutes les ressources d’une démocratie moderne, participative notamment, mais c’est la pré-condition pour rompre avec le présidentialisme dont on mesure les ravages aujourd’hui à Gauche.
Il faut donc bien "changer de République" et non pas seulement "changer la République" (formule inaugurale de l’invitation à ce débat). Ce projet est capital puisqu’il réunit la gauche toute entière, du PCF à la gauche moderne du PS. Finalement, l’isolement de Jean-Christophe Cambadélis s’est encore aggravé un peu plus avec ce débat du 16 avril. Est-ce la raison qui lui fait promettre en catastrophe depuis, la tenue d’une Convention nationale de son parti sur le sujet en 2016 ? Encore une promesse qui n’engage que ceux qui la reçoive de la part de quelqu’un dont le culot, si ce n’est le cynisme semblent ne connaitre aucune limite. On y reviendra très bientôt.
URL source : http://blogs.mediapart.fr/blog/paul-allies/220415/la-gauche-unie-pour-une-6-republique
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