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Convention pour la 6ème République

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Présidentielle : une procédure anachronique et comment s’en débarrasser.

vendredi 27 avril 2012, par Paul ALLIES

Dans le numéro 1200 de POLITIS (semaine du 26 avril au 2 mai 2012) , à la veille du second tour de l’élection présidentielle, Paul Alliès rappelle que de l’issue de la présidentielle dépend la possibilité de "déprésidentialiser" nos institutions, passage obligé pour aller vers un régime primo-ministériel parlementaire, et une démocratie sociale et politique concrète.
Bernard Vivien.

L’élection du président de la République au suffrage universel direct serait devenue en France la suprême expression de la souveraineté populaire, donc un droit démocratique irréfragable. Or il s’agit là, à la fois d’une grandiose méprise (cette procédure ronge inlassablement la démocratie politique) et d’une illusion d’optique (la France est le seul pays en Europe à pratiquer ce rituel anachronique).

D’abord, la méprise. Ce type d’élection au suffrage direct serait populaire comme en témoignerait des taux de participation plus élevés que dans les autres scrutins ; elle serait donc démocratique. Rien n’est plus abscons : l’élection est un mode parmi d’autres de choix politique, mais n’est en rien synonyme de démocratie.
Les régimes les plus autoritaires prennent soin de bien faire élire leur « guide ». En France, la tradition vient de loin ; des régimes bonapartistes où les plébiscites étaient la règle. Aujourd’hui cette élection produit une personnalisation absolue dont les effets sont très spécifiques. La France est le seul pays où ce scrutin conduit à conférer le maximum de pouvoir à un seul homme.
Ce n’est pas parce que le président de la V° République est élu au suffrage universel qu’il joue le rôle que l’on sait, c’est parce qu’il joue ce rôle qu’il est élu au suffrage universel. Dans aucun des douze pays membres de l’Union Européenne qui connaissent cette même élection, celle-ci ne conduit à une concentration du pouvoir comme chez nous.
Au contraire même ; les présidents ainsi élus y gagnent une magistrature d’influence ou d’arbitrage et rien d’autre. En France, ce sont les institutions mises en place en 1958 qui organisent la curialisation des « serviteurs de l’Etat », l’invasion des différents pouvoirs, de celui du Premier ministre à celui des médias, au profit d’un seul d’entre eux, celui de la Présidence. C’est cette concentration et centralisation de l’autorité qui suscitent un désenchantement démocratique cyclique : les citoyens ont tendance à se montrer déçus par l’exercice d’une telle puissance mais aussi à considérer que les autres institutions sont secondaires. Ils le manifestent par leur désaffection vis-à-vis de tous les scrutins, des Municipales aux Européennes. Et les partis ne parviennent pas à l’enrayer ; entièrement tournés (extrême-gauche inclue) vers le calendrier des présidentielles, ils s’épuisent à en préparer l’échéance décrétée « mère des batailles ».

Cette élection présidentielle est donc parfaitement anachronique. A l’heure des réseaux sociaux, de la démocratie participative, de l’interactivité et de l’échange horizontal des volontés, cette mobilisation verticale est névrotique : elle suscite des troubles émotionnels dont les citoyens ne peuvent se défaire. Comment donc s’en débarrasser ? Le Portugal et la Pologne ont montré la voie : voilà deux pays qui, au sortir de leurs dictatures, ont copié-collé la Constitution française. Le premier, l’a complètement abandonnée en douze ans de présidence de Mario Soares ; depuis 1987 c’est le Premier ministre qui a gagné définitivement l’essentiel de la responsabilité politique. Le second a suivi la même voie, mais contre un Lech Walesa qui voulait renforcer ses pouvoirs présidentiels après son élection en 1991. Et cinq autres « pays de l’Est » (de la Bulgarie à la Slovénie) ont évolué de cette même façon. C’est la perspective en Tunisie aujourd’hui. Bref tout s’est passé comme si le « modèle français » servait à sortir des dictatures à condition qu’il ne soit qu’une transition vers un régime primo-ministériel parlementaire.

Cette grande transformation, si une majorité parlementaire la veut, elle le peut. En France aussi et plus que jamais pour oublier définitivement le présidentialisme.

5 Messages

  • Bonjour,
    "Cette grande transformation, si une majorité parlementaire la veut, elle le peut. En France aussi et plus que jamais pour oublier définitivement le présidentialisme."
    On en est donc à espérer, pauvres de nous...
    La majorité parlementaire qui sera élue en juin, quelle qu’elle soit, sera un pur reflet de nos institutions qu’il faudrait par ailleurs réformer... : des élus "professionnels" qui auraient mauvaise grâce à saborder un régime dont ils tirent profit jusqu’à leur retraite. Le paradoxe est décidément trop fort, je ne crois pas que l’Assemblée nationale s’autosaisira en assemblée constituante. Ou alors, ce serait une DIVINE surprise ! D’ailleurs, quelle pourrait être la portée de ces réformes : retouches cosmétiques ou nouvelle voie démocratique ? Il y a longtemps que je ne crois plus au Père-Noël - fût-il socialiste d’autant plus que M. Hollande semble déjà avoir adopté le JE de majesté.
    D’ailleurs, on pourrait aussi parler de la centralisation à la française, des "grandes écoles", du pantouflage... Vous me suivez ?

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    • Bonjour, je vous félicite pour vos précisions, le discours paraît plus cohérent, ainsi.

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    • Comme vous le dites, c’est si les parlementaires le veulent et là ... y problème. Que le politique soit un professionnel pose un gros problème de démocratie même ... puisqu’ils votent des lois qui leur sont favorables, augmentation de salaires, retraites ... Le Droit devient oligarchique et construit en arrangement entre amis !
      Marie-Anne

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  • Présidentielle : une procédure anachronique et comment s’en débarrasser. Le 28 avril 2012 à 11:37 , par Saga des Gémeaux

    L’article met bien en lumière sur la nature perverse de l’élection du président de la République au suffrage universel direct. Même les Pères fondateurs de la Constitution américaine de 1787 (toujours en vigueur), avaient compris le danger qu’il y avait de faire élir le chef de l’Exécutif au suffrage universel direct. En 1848 Jules Grévy dans son discour à l’Assemblée constituante avait lui aussi dénoncé le danger que représentait l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel direct, la suite on la connaît. Les expériences portugaise et polonaise sont à méditer, car le "modèle français" a permis aux constituants de ces deux pays d’analyser les dangers que représentent le régime issu du coup d’Etat de 1958 orchestré par De Gaulle. En 1982 le Portugal révisait sa Constitution pour que le pouvoir exécutif soit confié au Premier ministre. La Pologne fera de même dans sa Constitution de 1997 en transférant le pouvoir exécutif du président de la République au Premier ministre. Lech Kaczsinski voulait en finir avec le régime parlementaire institué par la Constitution de 1997 et revenir à un pouvoir présidentiel datant de l’époque de Pilsudski l’homme fort de la Pologne d’entre-les-deux guerres. Si bien que le Premier ministre Donald Tusk songe à réviser la Constitution pour que le chef de l’Etat ne puisse plus nuire à l’activité du Premier ministre dans l’exercice de ses fonctions. Le "modèle français" est plus un repoussoir pour les pays qui sortent de la dictature, mais malheureusement les constituants tunisiens à l’exception d’Ennadha, souhaitent au contraire calquer leur future Constitution sur la Constitution gaulliste de 1958. Pour déprésidentialiser le régime politique français, commençons par abolir une bonne foi pour toute l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel direct, rédiger une nouvelle Constitution incluant une nouvelle déclaration des droits (celle de 1789 est périmée), maintenir la garantie juridictionnelle de la Constitution (seule chose de bien de la Constitution gaulliste actuelle) et revenir à un vrai régime parlementaire dans lequel le chef de l’exécutif est le Premier ministre responsable devant le Parlement.

    Saga des Gémeaux

    P.S : il faudra aussi instituer un référendum d’initiative populaire comme le fait la Constitution italienne de 1947 (article 75 de la Constitution).

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  • malheureusement, je crois que seuls quelques illuminés comprennent ce problème. Les français ne voyant pas le monde qui les entourent, ne comprennent pas cette problématique. Ils trouvent normal, qu’un président élu fasse son gouvernement en faisant fi de l’assmeblée élue (elle aussi mal élue par ce système majoritaire inique).

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