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Convention pour la 6ème République

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Un bulletin pour arrêter Le Pen

mardi 19 avril 2022, par Bernard VIVIEN

Le conseil d’administration de la C6R s’était donné rendez-vous au lendemain du 1er tour de l’élection présidentielle pour voir quelle déclaration faire au vu des résultats du scrutin. Or ceux-ci nous obligent.
Pour écarter le risque majeur pour la démocratie et l’Etat de droit que serait l’élection de Marine Le Pen, nous ne disposons comme citoyen(ne)s que d’un moyen, notre vote, avec le bulletin Macron pour empêcher le coup de force de l’extrême-droite et préserver la possibilité de poursuivre notre combat pour une 6ème république qui nous sorte d’un système institutionnel dont les effets délétères et mortifères pour la vie démocratique, ne pourront plus longtemps être ignorés ou mésestimés..
Bernard Vivien

Résolution du conseil d’administration de la C6R

Un bulletin pour arrêter Le Pen

  La première responsabilité de voir la France, possiblement basculer dans un « fascisme en civil » (Umberto Ecco), reviendra historiquement au système politique de la V° République.

Depuis trois décennies au moins, le diagnostic du délabrement de nos institutions a été dressé. Il s’est nourri de la chronique des « Présidentielles », élections où les citoyens sont contraints de voter en sacrifiant leurs convictions : au premier tour « utile » et au deuxième « contre ».

La condamnation est sans appel : un record d’abstention depuis 1965 (hormis 2002 avec l’élimination de Jospin). Une désaffection confirmée et croissante des jeunes générations : 42% d’abstentionnistes chez les 18-24 ans ; 46% chez les 25-34 ans.

En dépit de cette sénescence, se reproduit ainsi un présidentialisme sans pareil nulle part ailleurs, et complètement anachronique. Une société où ont grandi le partage des connaissances, la participation à la chose publique, l’interactivité sociale, est remise entre les mains d’une personne dotée du pouvoir d’envahir tous les autres. Et de gouverner selon son bon vouloir.

 La deuxième responsabilité incombe à Emmanuel Macron lui-même. Il est, en cinq ans, devenu la figure haïssable de ce système démocratiquement décadent dont il a aggravé les traits. Notre analyse d’avant le 1° tour (29 mars 2022) documentait un bilan où se conjuguait le mépris, le cynisme et l’autoritarisme.

Sa campagne de l’entre-deux tours a été marquée par quelques ouvertures sut la nécessaire réforme du système politique (avec la proportionnelle et un pouvoir d’initiative référendaire mieux reconnu pour les citoyens). A l’évidence, le sujet d’une refondation de la République, s’imposera après sa réélection éventuelle.

Cependant, après avoir complètement oublié ses promesses en la matière depuis cinq ans, il a légitimé l’extrême-droite (sa presse, ses figures, ses repères historiques). Il se vit pourtant comme l’opportun et naturel rempart contre celle-ci.

Sauf que les logiques électorales lui échappent. Et les citoyens que nous sommes sont seuls à devoir endosser la responsabilité de décisions aux dramatiques conséquences.

 Car l’élection de Marine Le Pen, soutenue par Eric Zemmour, ne serait pas un épisode ordinaire dans cette longue et lamentable histoire. Elle est devenue possible. La peur qu’elle suscite nous oblige à la plus grande rigueur pour en apprécier les suites.

Plutôt isolés avant le 1° tour, nous avons concentré notre analyse (toujours dans ce texte du 29 mars) sur les atteintes certaines à l’Etat de droit en jouant sur les apories du souverainisme tel qu’établi par l’article 3 de la Constitution : la souveraineté nationale y subordonne la souveraineté populaire, « par la voie du référendum ». Un référendum dont l’initiative appartient, pour l’essentiel au président de la République. Un Conseil constitutionnel, secret et chétif surveillant de la procédure, tente de se promouvoir gardien de l’Etat de droit. Les règles aberrantes de la nomination de ses membres (en particulier les trois derniers du mois de février) risquent fort de ne pas suffire à contenir une offensive fascisante contre les principes généraux et le « bloc de constitutionnalité ».

Or c’est ce à quoi l’élection de Marine Le Pen engage. Elle est en parfait accord avec ces propos d’Eric Zemmour, affirmant que leur plan contre l’immigration (« la priorité nationale ») « ne peut s’appliquer que si on se débarrasse des contraintes juridiques de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, de la Cour de Justice de l’Union Européenne et du Conseil Constitutionnel. »

Il n’y a pas que l’immigration (maghrébine, africaine mais aussi européenne et ukrainienne) qui est concernée.

L’introduction de la « préférence nationale » dans la Constitution dont Le Pen-Zemmour ont fait leur étendard, contredirait d’emblée les principes d’égalité, de non-discrimination, de liberté religieuse, de droit d’asile et de solidarité. Il permettrait ensuite la remise en cause des principes et droits suivants pour tous les citoyens français : les « droits barrières » (interdisant à l’Etat de pénétrer dans la sphère privée) tels que liberté d’opinion, d’expression, de circulation ; les « droits de créance » (des individus sur l’Etat) tels que le droit à la santé, à l’éducation, au logement, au travail. C’est le mécanisme de leur reconnaissance et protection qui sautera si un le référendum prévu a lieu.

Le gouvernement par référendum est la seule vrai conviction de Le Pen, affirmée avec constance depuis 2002. C’est ainsi que cela s’’est passé en Hongrie, pointe avancée de ces mal nommées « démocraties illibérales » qui fédèrent idéologiquement les extrême-droites européennes, avec le soutien bien réel de Poutine.

Cela se fait sans rien changer à la façade institutionnelle des régimes politiques. Marine Le Pen va répétant son admiration pour la V° République. « Quand certains parlent d’aller vers une VI° République, je leur dit : revenons déjà à la V° (…) Les institutions de la V° République sont tout à fait aptes à exprimer la démocratie pour le peuple français ». (18/02/2017). Et d’en conclure le 12 avril dernier : « Je ne renonce à utiliser aucun des articles de la Constitution, car cette Constitution est une merveille d’équilibre et par conséquent, elle a été conçue pour que l’ensemble des articles puissent être utilisés ». En avant donc vers le 49.3 (pour lequel elle a précisé son attachement) ; et l’article 13 autorisant une dictature légale.

Le coup de force permanent sera donc devenu possible. Le totalitarisme est bien un concept d’avenir (Claude Lefort).

Il faut donc dire clairement Non. Et cela n’est possible qu’avec un bulletin de vote. Il portera le nom de Macron, tant pis. Est-il besoin de demander à ce dernier de « gauchir » ses discours, d’amender son programme « classe contre classe » ? Au mieux, cela produira un effet de condescendance, tant il est devenu impossible de croire au futur démocratique de ce Président. Sa direction des affaires de l’Etat par Conseil de secret-défense et cabinets-conseils, et en état d’urgence permanent, est trop ancrée dans sa philosophie gouvernante.

Faisons donc et sans lui, ce que l’Histoire exige de nous en un seul jour et un seul vote : votons Macron pour empêcher le coup de force de Le Pen et rendre possible, plus que jamais d‘actualité, la poursuite d’une bataille pour une 6° République.

Le conseil d’administration de la Convention pour la 6° république
Le 19 avril 2022.

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