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L’impossible démission de Nicolas Sarkozy et l’oubli d’une réforme du Conseil constitutionnel

lundi 3 décembre 2012, par Paul ALLIES

L’intervention de Nicolas Sarkozy dans le conflit Fillon-Copé pour la présidence de l’U.M.P a mis une fois encore en lumière cette anomalie française qui fait des anciens présidents de la République des membres de droit à vie du Conseil Constitutionnel qui, avec les questions prioritaires, est devenu un juge essentiel dans l’Etat de droit. Outre une suppression de cette exception française, c’est une réforme radicale du mode de nomination des membres du Conseil Constitutionnel qui est nécessaire. Une réforme qui semble être passée aux oubliettes....Bernard Vivien

S’impliquant ouvertement dans le règlement de la crise de l’UMP, Nicolas Sarkozy fait l’objet d’appels réitérés à sa démission du Conseil Constitutionnel. Deux députés socialistes, estimant "cette situation fort préjudiciable au fonctionnement de nos institutions" demandent que le dit Conseil soit saisi pour statuer sur "l’indépendance de la fonction" de conseiller constitutionnel que mettrait en cause le comportement de l’ex-président.

Cette démarche, sans doute opportune ne règlera rien sur le fond et pour plusieurs raisons.

Concernant la démission, elle est tout simplement impossible dans la mesure où les anciens présidents de la République font "de droit partie à vie du Conseil" selon l’article 56 de la Constitution. Ils ont certes les mêmes droits et obligations que les autres membres nommés mais rien ni personne ne peut leur interdire de poursuivre une activité politique.

Le cas s’est déjà posé avec Valéry Giscard d’Estaing après 1981 : il n’a en rien respecté l’obligation de réserve qu’impose le statut de membre du Conseil en participant à la campagne pour le référendum sur le traité européen en 2005 ainsi qu’à la campagne présidentielle de 2007 en soutien à Sarkozy. Il ne s’est jamais "mis en congé" : il a été élu député de 1984 à 2002, député européen en 1989 et président du Conseil régional d’Auvergne de 1986 à 2004. D’ailleurs le Conseil Constitutionnel s’est prononcé dès le 7 novembre 1984 sur cette situation en rappelant "l’assimilation" des membres de droit aux autres membres concernant leurs obligations, ce qui n’a rigoureusement eu aucune conséquence.

Dans un autre registre, Jacques Chirac, membre de droit depuis mai 2007 a fait l’objet d’une procédure judiciaire dans l’affaire des emplois fictifs du RPR ce qui pouvait causer pour le moins un trouble au bon fonctionnement de l’institution. Même la destitution du président, prévue par la réforme constitutionnelle de 2008 ne pourrait pas empêcher l’application stricte de l’article 56.

En réalité nous sommes une fois de plus dans une situation absolument anachronique et unique en Europe, typique du présidentialisme de la V° République. Toutes les commissions (Vedel, Balladur et Jospin) de réforme ou modernisation des institutions l’ont souligné en réclamant la suppression de cette catégorie de membre de droit.

Mais ce n’est qu’un arbre qui cache la forêt de l’exception française en matière de désignation des "juges" constitutionnels par des autorités politiques (les présidents de la République, de l’Assemblée Nationale et du Sénat). Partout ailleurs les membres des cours suprêmes ne sont pas désignés mais élus par les députés à une majorité qualifiée, généralement des deux tiers des voix, ce qui exige un consensus parlementaire pluraliste sur les personnalités appelées à juger la loi ordinaire.

Et c’est bien à cette réforme de l’institution dans son ensemble qu’il faut s’atteler sans délai. Le Conseil constitutionnel est devenu, avec l’introduction des "questions prioritaires de constitutionnalité" un juge essentiel dans l’Etat de droit. Il est invraisemblable que ses membres n’aient pas la qualité individuelle de leur instance collégiale. Il est inquiétant que la gauche n’ait pour l’instant rien dit de l’urgence de cette réforme.
URL source : http://blogs.mediapart.fr/blog/paul-allies/031212/limpossible-demission-de-nicolas-sarkozy-et-loubli-dune-reforme-du-cons

4 Messages

  • La gauche n’a jamais rien fait et ne fera rien qui puisse remettre en question cette situation. Ce n’est pas avec Hollande que l’on réformera cette Constitution autoritaire. En ce qui concerne le Conseil constitutionnel, il faut le reformer de fond en comble, et le transformer en une véritable Cour constitutionnelle digne de ce nom. Mais cela ne peut se faire que dans le cadre de la rédaction d’une Constitution moderne (avec si possible une nouvelle Déclaration des Droits, celle de 1789 est périmée et dépassée).

    Saga des Gémeaux

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  • Une précision, la gauche a bien dit quelque chose à ce sujet, c’est même dans leur programme pour les présidentielles p. 55 : http://www.parti-socialiste.fr/static/projet2012_integrale.pdf

    Malheureusement, un programme reste un programme...ou plus exactement un projet.

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    • La gauche n’en fera rien, car elle accepté la logique absolutiste gaullienne des institutions politiques actuelles. Comme vous le dite vous-même "un programme reste un programme", et sur ce terrain-là Hollande vous a arnaqué en beauté. Aucun des candidats qui se présentent à cette mascarade électorale que sont les présidentielles ne remettront en cause la logique absolutiste gaullienne, donc c’est peine perdue que de compter sur des gens qui ne feront rien. En ce qui concerne le Conseil constitutionnel, j’ai toujours un partisan de sa transformation en une vraie Cour constitutionnelle digne de ce nom. Mais cela ne peut se faire que dans le cadre de l’élaboration d’une nouvelle Constitution moderne.

      Saga des Gémeaux

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      • Quand on est loin du pouvoir on y est d’accord,mais ,dés qu’un homme politique tel un président de la république goute au pouvoir ,il n’en fera rien,au contraire,et c’est aussi en cela,que l’intérêt personnel des hommes politiques tranche avec ce que l’ont attend d’eux à savoir travailler pour l’intérêt général.Avec la venue de la 6èm république j’espère que cette question y sera régler.

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